Ces dernières années, nous autres joueurs de guitares avons été assez chanceux car le prix des instruments a chuté régulièrement (sauf ceux fabriqués dans les pays industrialisés), grâce (ou à cause) de la mondialisation qui a frappé le marché des instruments de musique. Désormais la plus grande partie de nos instruments favoris sont fabriqués en Corée, en Indonésie, en Chine, au Vietnam, … La chute de ces prix s’est accompagnée en plus d’une hausse du rapport qualité – prix, puisque les instruments produits dans ces pays ne sont plus d’infâmes planches injouables avec les cordes à 3 cm du manche. Donc c’est tout bénéfice pour le consommateur qui se retrouve avec un grand choix de guitares peu chères (même si des instruments plus chers sont également produits dans ces pays et en Corée plus particulièrement).
En revanche, cette course aux prix tirés vers le bas a une conséquence assez inattendue pour les sociétés faisant fabriquer offshore. Les donneurs d’ordres étant plus nombreux, le prix baissent mais les marges sont elles aussi tirées vers le bas. Dans ces conditions, il devient plus difficile de tirer des profits suffisants sauf à écouler beaucoup d’unités des ces guitares à bas prix. Certaines entreprises sont donc contraintes de prendre une décision radicale, celle de supprimer leur gamme de guitares importées (comme disent nos amis américains).
C’est en tous les cas la direction que prend la marque St Blues qui avait depuis quelques années toute une gamme de guitares asiatiques à son catalogues en plus de ses modèles Made In USA. Le revirement est de taille puisque nous parlons ici de ne plus vendre que des guitares haut de gamme, fabriquées à petite échelle, de très haute qualité et fabriquées dans l’un des berceaux du rock, Memphis (Tennessee, pas Égypte).
Selon le communiqué de la marque, cette décision va permettre de restaurer des marges correctes, de créer des emplois sur le sol US et surtout de maitriser de A à Z la production afin de ne sortir que des guitares presque Custom Shop.
Mais au delà de ce cas (qui est peut être isolé), que va-t’il se passer si dans un avenir proche, ces guitares asiatiques sont plus suffisamment rémunératrices pour les compagnies qui les font produire. Le cas de St Blues s’applique aux guitares de moyenne gamme (disons en dessous de 1 000 $) qui sont souvent de très bons instruments. Si ce genre de production s’arrête, il ne restera plus que les segments du bas de gamme pour débutant et le haut de gamme. Bien sûr, on aura toujours la possibilité d’aller voir un luthier, mais les prix sans aller dans le très haut de gamme, sont presque toujours au dessus de cette barre fatidique des 1 000 euros. Si on veut autre chose que du Fender Mexique, de l’Epiphone ou de la PRS SE (ces marques avec leurs volumes auront toujours intérêts des marges suffisantes pour continuer à vendre sur ce segment) ce sera impossible.
Bref, cette news de la part de St Blues me laisse mi figue mi raisin. Pour la marque, c’est une bonne chose de se recentrer sur des instruments haut de gamme US, pour leur image de marque et pour leur profitabilité (ce qui me laisse à penser que les marges sur ces instruments sont très élevées puisqu’en produire moins rapporte plus …). Mais d’un autre côté, je commence à me demander si on n’arrive pas à la fin d’un cycle comme celui qui s’est produit lorsque le Japon est devenu trop cher pour produire des guitares de bonne qualité à bas prix. Les marques vont devoir retrouver des pays émergents moins chers mais avec le désavantage de ne pas avoir des masses d’expérience dans la manufacture de guitares de qualité. C’est peut être le consommateur qui va en pâtir au final.
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